Relieur amateur : les prérequis pour avancer
Si vous êtes ici, c’est que vous connaissez déjà la reliure et la pratiquez de manière occasionnelle en tant que relieur amateur, chez vous ou dans une MJC. C’est parfait, car vous avez déjà quelques notions de vocabulaire et de pratique, ce qui va faciliter nos échanges et votre compréhension des explications. Grâce aux tutoriels, je vous aide à améliorer votre technique pour aller plus loin dans vos réalisations, étape par étape, le tout à votre rythme. Je peux également vous apporter mon aide via les commentaires. N’hésitez donc pas à commenter les articles et me donner votre avis, partager vos difficultés et vos réussites. Dans tous les cas, patience et minutie sont vos alliés pour le succès de vos reliures !
Avant d’entamer les premiers tutoriels « Amateurs éclairés » de l’Art Reliure, remémorons-nous ensemble 3 prérequis indispensables qui vont vous permettre de créer dans les meilleures conditions possibles :
1) Prérequis n°1 : aménager son espace de travail
Si vous en avez la possibilité, le mieux pour être suffisamment à l’aise est de vous réserver un espace créatif rien qu’à vous, dans un bureau ou un garage chauffé par exemple, bien au calme et si possible avec une bonne lumière naturelle.
Le métier de relieur/cartonneur s’exerce principalement debout, c’est pourquoi je vous conseille d’utiliser un plan de travail assez haut (qui arrive au bas du ventre, 92 cm dans mon cas) et de le placer contre un mur ce qui vous permet d’y attacher vos outils ou de les ranger contre celui-ci sans qu’ils ne tombent. Vous pouvez également y fixer des étagères, ce qui s’avère toujours utile pour le rangement et stockage de vos créations et matières premières.
Il vous faut alors une chaise réglable en hauteur (avec un dossier de préférence) pour réaliser certaines étapes assises confortablement comme la couture par exemple.
Pour ma part, j’utilise deux tréteaux ajustables en hauteur et une planche en bois. Je vous recommande un plan de travail d’environ 150 cm de large sur 70 cm de profondeur, ce qui laisse suffisamment d’espace pour prévoir un coin séchage et un coin pratique (découpe, encollage, couture…).
2) Prérequis n°2 : s’équiper d’outils adéquats
1/2 toile, 1/2 cuir à coins, plein cuir, bradel plein papier, étuis, coffrets…Pour réaliser toutes ces reliures et boîtages, vous avez besoin d’outils et d’accessoires indispensables. En tant que relieur amateur, vous avez déjà probablement une bonne partie du matériel nécessaire. Je vous laisse vérifier via la liste ci-dessous qu’il ne vous manque rien 😉 :
Les outils de reliure :
- Un bon cutter & un scalpel : si vous n’avez pas de cisaille, le cutter vous sert à couper le carton. Le scalpel, qui permet une coupe plus précise et légère, vous sert à couper la toile et le papier. Je vous conseille d’avoir 2 manches de scalpel avec les lames correspondantes suivantes : manche n°3 – lame n°10A (lame pointue) et manche n°4 – lame 25 (lame plate).
- Un grattoir (coupe-papier) : pour couper les fils et enlever la colle des fonds de cahiers lors du débrochage de vos ouvrages.
- Une paire de bons ciseaux : pour couper du fil, les coins en papier et en toile…
- 3 réglets métalliques : le réglet fin de 30 cm de long (n°1) se glisse facilement dans les endroits étroits ou une coupe de matière est nécessaire (cartonnage par exemple ou pour découper les gardes qui dépassent du bloc livre). Les deux réglets plus larges de 30 et 50 cm de long (n°2 et 3) vous permettent de débiter ou couper au bon format vos matériaux de recouvrement dans les cas ou vous n’avez pas de cisaille (toile, papier…).
- Un compas à pointes sèches : il sert essentiellement à prendre des mesures très précises sans avoir à utiliser un réglet.
- Une plaque de Zinc : elle vous sert de support pour élaguer le papier, les cartes à dos et le cuir sans entamer votre tapis de coupe. Elle sert également pour découper les gardes qui dépassent du bloc livre sans abîmer vos remplis.
- 3 équerres : l’équerre à talon (n°1) vous permet d’obtenir des reliures et des boîtes qui se tiennent bien droites. Les équerres (n°2 et 3) vous servent pour la prise de mesure et le traçage de vos traits préalablement à une découpe ou un collage.
- Un plioir pointu & un pavé de lissage en téflon : le plioir pointu en os ou téflon (n°1) est utile pour remplier la matière autour du carton et réaliser les angles (les coins) avec précision. Il vous permet également de plier le papier pour créer les cahiers de garde. Le pavé de lissage en téflon (n°2) vous sert à lisser la matière lors d’un encollage (chasser les bulles d’air, éviter les plis) pour faciliter son adhésion au support. Vous pouvez également utiliser le plioir sur son côté long pour cette opération.
- 2 poinçons ronds : un fin (n°1) pour percer les trous dans les cahiers de garde pour permettre la couture et un plus large (n°2) pour réaliser la passure en carton.
- Un ciseau à bois : il sert à créer les encoches des rubans. Choisir de préférence un ciseau d’une largeur de 1,6 cm.
- Un marteau classique : pour frapper sur le poinçon rond épais et percer les cartons
- Un marteau à endosser : son bout arrondi permet de ne pas abîmer les cahiers lors de l’endossure.
- Une scie à grecquer : pour réaliser le perçage des fonds de cahier avant la couture. Choisir une lame fine avec des petites dents.
- Une petite lime triangulaire : pour élargir les encoches destinées aux ficelles de couture.
- Un bloc à poncer avec recharge : pour biseauter ou atténuer les arêtes des cartons, poncer le dos de vos reliures… Choisir un grain moyen (numéro 120). Cet outil est à recharger régulièrement.
- 3 pinceaux : un petit à bout plat (°1) pour encoller les remplis, les coins et de petits éléments avec précision. Deux autres à bout rond (n°2 et 3), un moyen et un plus gros pour réaliser les encollages de surfaces plus ou moins grandes. Il est important que leur poils soient suffisamment souples pour étaler facilement la colle.
- 2 pinceaux doux : Un large (n°1) pour dépoussiérer vos cahiers lors du débrochage et un fin pointu (n°2) pour humidifier les encoches de coiffes après la couvrure de vos reliures en cuir.
- Des aiguilles : un jeu d’aiguilles simples avec des chats variables selon l’épaisseur du fil.
- Une pince à nerfs : pour pincer les nerfs lors de la couvrure.
- Un trace coins : pour tracer facilement (sans calcul) les coins aux bonnes proportions.
Le matériel :
- Un cousoir : pour coudre vos cahiers ensemble.
- Une presse à main : pour tous les travaux sur le dos du livre (encollage, ponçage) ou pour réaliser vos tranchefiles à la main.
- Un tablier de protection : pour vous protéger de la colle et vous essuyer les mains.
- Un tapis de coupe : pour protéger votre plan de travail et réaliser toutes vos découpes et encollages. Le format idéal est 60 x 90 cm avec des graduations.
- Un support massif en bois ou un tas en plomb : pour taper au marteau dessus sans abîmer votre plan de travail, pour le perçage des cartons avec le poinçon rond large par exemple.
- Un minimum de 2 ais de bois (planche de médium) : elles vous servent à faire sécher à plat et sous poids vos reliures, notamment après un collage. Faites découper vos planches au format de votre presse. Si vous en possédez plus, votre travail sera plus confortable.
- Des petits et gros poids : au minimum 2 poids de 2kg et si vous trouvez, un plus lourd de 5kg. On en trouve régulièrement en brocante. Sinon, bien que cela soit moins pratique, des gros dictionnaires, ou bouteilles remplies de sable font le job ;-). Ces poids, posés sur vos planches de bois servent à maintenir vos créations bien à plat pendant le séchage.
- De pots en verre pour l’eau et la colle : choisissez des pots assez larges et hauts afin qu’ils restent en équilibre, peu importe la taille et la lourdeur de vos pinceaux. Des boîtes de conserve en verre font très bien l’affaire.
- Une grosse poubelle : la placer sous votre plan de travail et suffisamment proche de vous pour jeter directement et rapidement vos chutes et macules (supports d’encollage).
Le gros matériel :
- Un étau à endosser : pour grecquer et endosser les dos de vos ouvrages.
- Une cisaille : pour ébarber les cahiers, couper les matériaux d’équerre et aux dimensions finales.
- Un massicot : pour couper net l’ensemble des tranches du bloc livre (tête, queue, gouttière). Il est possible de s’en passer et d’ébarber les cahiers à la place.
- Une presse : elle vous sert constamment pour vos collages, les presses de plaçure, de corps d’ouvrage et de finissure. Une petite presse de notaire peut suffire (dernière image).
Voilà qui constitue la quasi-totalité du matériel et outillage de reliure nécessaire. Vous pouvez trouver tout cela sur les sites internet suivants :
- Relma (site non marchand)
- APG reliure
- L’éclat de Verre
- Magasins d’Arts & Loisirs créatifs
- Magasins de bricolage
Certains outils sont parfois moins chers sur L’éclat de verre que sur APG Reliure et parfois c’est l’inverse. N’hésitez donc pas à faire des comparaisons entre ces 2 sites !
Pour ce qui concerne le gros matériel, n’hésitez pas à chiner les brocantes ou à garder un œil sur le bon coin. Vous pouvez bien sûr l’achetez neuf (très cher !), mais moi-même je ne possède que du matériel d’occasion et j’en suis très contente. Je reconnais qu’il n’est pas facile pour un relieur amateur de stocker des outils aussi encombrants et lourds chez soi, c’est pourquoi, si vous avez la possibilité de faire de la reliure dans un club ou une MJC, alors n’hésitez plus. Pour perfectionner votre technique, ces outils s’avéreront indispensables.
Il existe encore tout un tas d’accessoires qui peuvent vous faciliter la pratique, mais j’en parlerais dans un prochain article, car ceux-là ne sont pas incontournables pour réaliser vos reliures et boîtages.
Concernant les matières premières consommables (carton, carte bulle, carte de lyon, kraft, papier, toile, colle, fil, ficelle, ruban…), elles sont propres à chaque type de création et sont donc listées au début de chaque tutoriel.
3) Prérequis n°3 : prévoir suffisamment de temps libre
Ce point me semble être important, car il n’y a rien de plus frustrant que de s’engager dans une création et de devoir s’arrêter en plein milieu d’un collage ou d’un calcul de mesure par exemple parce que l’on est dérangé par un élément extérieur :
RDV, coup de fil, sonnette, enfants affamés, conjoint(e) à la recherche de ses clefs, chien en besoin de promenade imminente…Bref vous voyez de quoi je parle 🙂 .
J’ai en effet souvent rencontré ce « problème » quand un client rentrait dans la boutique alors que j’étais en pleine couvrure d’un livre, m’obligeant alors à précipiter mes gestes au pire moment. Et c’est là que les erreurs arrivent…
Ou alors en fin de journée, quand je dois absolument quitter l’atelier, mais qu’il me manquait une petite demi-heure pour achever le travail du jour. Quelle frustration…
Au final, ce fut assez simple pour moi de remédier à ce petit désagrément, il m’a juste fallu imposer des horaires spécifiques à mon atelier. Ainsi, je sais que de telle heure à telle heure, je peux m’engager dans une tâche un peu délicate sans souci d’être interrompue. Cela évite les mésaventures…À vous de voir ce que vous pouvez mettre en place de votre côté pour profiter au mieux de ce moment à vous ! 😉
>>> Ce qu’il faut retenir !
- Prévoir un plan de travail pour travailler debout selon votre taille
- Prévoir une chaise haute réglable en hauteur avec un dossier
- Prévoir une une surface de travail dégagée : 150 x 70 cm environ
- Investissement outils : variable selon si neuf ou occasion !
- Disponibilité : 2 h min
8 commentaires
DEBRIVA
Très bon article, je serai preneur des suivants…. félicitations
L'Art Reliure
Merciiii beaucoup ! Votre commentaire m’encourage à continuer. Malheureusement je manque de temps avec mes commandes à l’atelier pour rédiger de nouveaux articles. Ce ne sont pas les idées qui manquent ! J’espère m’y remettre bientôt 😉
Freddy
Bonsoir,
Jolie blog très intéressant. Relieur, un métier d’avenir pour les amoureux du livre. En espérant que la passion triomphe contre le feu, l’humidité, les xylophages, les souris, le nihilisme, le temps, les écrans, et autres ennemis du livre.
Côte à côte avec la forêt.
Bravo, merci et bon courage !
L'Art Reliure
Bonjour,
Merci pour votre commentaire ! Je pense que la reliure a encore de bonnes années devant elle. Je rencontre beaucoup de jeunes (et moins jeunes) qui s’y intéressent ou se reconvertissent 😉
Isabelle
Bonjour,
Je viens de découvrir votre blog qui me plait déjà beaucoup! J’ai hâte de découvrir d’autres articles.
Concernant les tutoriels DIY, ils ne sont pas encore mis en place c’est bien cela? Parce que je ne les trouve pas.
J’aime beaucoup la reliure et il est difficile de trouver, en français, des tutos pour progresser à la maison 😊 Bravo!
L'Art Reliure
Bonjour Isabelle,
Merci beaucoup pour votre commentaire encourageant ! En effet, les tutoriels ne sont pas encore en ligne, car je manque de temps. Le tuto « Mini album photo accordéon » est presque terminé. Il existera en version PDF et en version Kit (tuto + matières premières) disponible à la vente. Je fais au mieux pour finaliser tout cela au plus vite. Souhaitez-vous que je vous ajoute à la Newsletter de « L’Art Reliure » afin de vous prévenir quand celui-ci sera prêt ? 🙂
Michaël
Vous avez un très beau site internet et vos conseils pour les amateurs sont justes et affinés. Je suis à la recherche d’une reconversion d’un métier passion tel que celui-ci. Le passage par une école ou formation diplomante est-il primordiale pour débuter ce métier ?
Bien cordialement.
L'Art Reliure
Bonjour Michaël,
Merci pour votre commentaire et votre compliment sur mon site.
Il me semble que la plupart des activités artisanales sont soumises à un diplôme comme un CAP, BMA ou d’une validation d’acquis d’expériences acceptés par les Chambres de Métiers et de l’Artisanat. C’est en tout cas le cas du métier de relieur/doreur. En effet, je ne crois pas qu’il soit possible d’avoir un numéro d’immatriculation auprès de la chambre des métiers et de l’artisanat sans diplôme ou équivalent.
Ceci étant dit, il est probablement possible de créer et de vendre des carnets en autodidacte avec un statut de micro-entrepreneur. Dans ce cas, l’enregistrement se fait plutôt, il me semble, au registre du commerce. Vous n’aurez n’aurez cependant pas la qualification de « Relieur d’Art ».
Ayant mes diplômes et n’ayant donc pas été concernée, je vous laisse vous renseigner davantage sur le sujet si vous souhaitez vous lancer. Vous pouvez par exemple vous rapprocher la chambre des métiers et de l’artisanat de votre région. Dans tous les cas, le métier de relieur est très technique. C’est un vrai savoir-faire, il exige rigueur et minutie et est soumis à certaines conventions/règles. Si ce métier vous plait, je vous conseille d’effectuer dans un premier temps un stage chez un professionnel avant de vous lancer dans une formation diplômante.
Espérant avoir répondu à votre question,
Bien à vous,